Face aux pressions et aux sollicitations de tous ordres, nous sommes tous à la recherche d’une méthode qui pourrait nous aider à mieux organiser notre temps et notre travail. Pourtant, nous oublions que souvent il s’agit d’abord d’une question de gestion de rythme, entre action et réflexion, prise de vitesse et moments de calme. Dans le monde de la restauration on connaît bien cela avec le “coup de feu”, ce moment très spécial où il faut passer d’une gestion tranquille à un travail ultra soutenu. Savoir accélérer pour faire face aux surcroîts de pression mais aussi savoir ralentir pour prendre du recul, se reposer, recharger les batteries et nourrir son quotidien au-delà de l’action : voilà deux compétences qu’il nous est pour beaucoup difficile à mettre en œuvre. Certains foncent constamment, sur un rythme effréné, engagés dans l’action à tout prix, et perdent ainsi la capacité à poser les choses et même parfois à prendre du plaisir. D’autres à l’inverse, ancrés dans la réflexion, la préparation, le soin méticuleux à faire émerger les choses d’abord dans la pensée, ont un mal fou à passer à l’action et à monter en puissance lorsque les conditions de leur environnement exigent un mouvement rapide et soutenu dans le temps.
Enfin, les écarts de rythmes sont souvent une des causes principale des difficultés dans les coopérations et le travail en commun, car on n’arrive pas à se synchroniser avec l’autre pour produire efficacement ensemble.
Plus que de gestion du temps, on devrait peut-être parler de gestion du rythme, et s’efforcer d’apprendre à varier les rythmes, à les synchroniser ou à s’adapter au rythme de l’autre dans un fonctionnement coordonné et harmonieux. Dans un orchestre, les instruments jouent des rythmes différents, pourtant ils s’harmonisent et se complètent pour exécuter l’œuvre dans son ensemble. Cela nécessite une écoute puissante, d’abord de soi, ensuite des autres, pour trouver le juste rythme dans le respect de la partition. Et pour chaque musicien, respecter sa partition, et la beauté de la musique, cela veut dire aussi savoir varier ses rythmes, non seulement parce que c’est écrit dans la partition, mais aussi et surtout parce que la richesse de la musique sera liée à la nuance entre les différents rythmes qui se succèdent.